Attention, cette chronique porte sur une œuvre destinée à un public averti car elle contient des scènes particulièrement violentes ou sexuellement explicites.
Tokyo Tribe est un film écrit et réalisé par
SONO Sion, adaptant le manga
Tokyo Tribe 2 de
INOUE Santa. Le film est disponible en France chez
Wild Side.
Avant de commencer cette chronique, je rappelle que le film a été
déconseillé aux moins de 16 ans lors de sa sortie en salles au Japon. Je précise également que je n'ai pas lu le manga et que je ne connais rien au monde du rap.
Tokyo Tribe nous raconte, sous un rythme Hip-Hop, une nuit très agitée qui verra naître et mourir une guerre des gangs opposant les différentes tribus régnant sur les territoires des bas-fonds de Shinjuku et Shibuya. Le film a la particularité d'être une comédie musicale rap, dont les sujets centraux sont : le sexe, la violence et encore le sexe. Par ailleurs, les sous-titres des chansons proposés par
Wild Side sont de très bonne facture, parvenant à en conserver les rimes et le sens.
Le contexte et les protagonistes nous sont présentés par
MC Show, un narrateur qui a la particularité d'être interne au récit, naviguant dans le flot des gangs, d'un décor à un autre, interagissant avec les personnages et prenant même part au combat. Ce personnage est une très bonne trouvaille car il intrigue et fascine le spectateur tout au long du récit et ceci est grandement aidé par la très bonne prestation de son interprète
SOMEYA Shōta (
Parasyte,
Minna ! Esper Dayo!), dont le rap est fluide et compréhensible.
Nous suivons donc ce narrateur un peu particulier nous présenter chaque secteur et gang, tout en laissant le leader de chacun d'eux se présenter en chanson. Mais ce qui était une bonne idée pour donner de l'importance aux personnages secondaires et bien mettre en place le contexte devient vite un problème. En effet, avec environ neuf tribus à introduire, le scénario n'avance pas alors que le film a commencé depuis déjà trente minutes. D'ailleurs, à mesure que le film progresse, on remarquera que les chansons se font de plus en plus rares, au profit de l'action et de quelques dialogues.
L'action se déroulant dans les bas-fonds de Tokyo, le décor est sale, encombré de détritus, surpeuplé, et la prostitution et la drogue y règnent en maîtres. Par contre, ces lieux sont également décorés de multiples ampoules de couleurs et la musique y est très présente, symbolisant la joie de vivre règnant en ces lieux.
On peut d'ailleurs remarquer qu'il pleut et qu'il n'y a que peu de couleurs à deux moments dans le film :
- Lorsque la police intervient, ces personnes extérieures au bas-fond ne comprennent pas ce mode de vie ;
- Lorsque Kai perd la foi suite à un tragique événement...
Mais le film n'est pas exempt de défaut et on peut difficilement faire abstraction de la mauvaise qualité des effets spéciaux. Je pense surtout à ce tank, dont la première apparition relève presque de l'amateurisme surtout que dans le plan suivant, celui-ci apparaît de face, en plein cadre et sans effet numérique. Les scènes de combat ne sont pas toujours bien filmées, l'action est trop découpée au point que les personnages ont tendance à se téléporter d'une scène à l'autre. On remarquera qu'il y a que deux personnages qui savent vraiment se battre,
Yon et
Sunmi.
En ce qui concerne le jeu des acteurs, nous avons toute la palette, du très bon au très mauvais. Le haut du panier est tenu par
SOMEYA Shōta pour
MC Show dont je parlais plus tôt et
SEINO Nana (
Ouroboros,
Mare) dans le rôle de
Sunmi, une femme forte. La prestation de
SUZUKI Ryōhei (
Hentai Kamen,
Ore Monogatari!), interprète de
Mera, est déjà plus compliquée à juger, le personnage étant lui-même une caricature du leader de gang fasciné par son corps (surtout son "Johnny") et on peut objectivement se dire que c'était la seule manière de le jouer. Quant aux personnages de
Kai et
Tera, interprétés respectivement par
Young Dais (membre du groupe de J-rap
North Coast Bad Boyz) et
SATŌ Ryūta (
Rookie,
Heat), ils ne sont pas assez exploités pour que l'on s'attache vraiment à eux.
Le problème vient des autres personnages et principalement de celui de
Bubba, interprété par
TAKEUCHI Riki (
Dead or Alive,
Izo), qui nous offre une parodie de chef Yakuza tellement surjouée que les scènes où il apparaît sont à la limite du vraisemblable.
Au final que penser et dire de ce
Tokyo Tribe... ?
Très franchement, je ne sais pas. Si vous êtes fan de l’œuvre d'origine, passez votre chemin. Je pense que le réalisateur et scénariste
SONO Sion a pris beaucoup trop de libertés dans l'adaptation pour qu'elle puisse vous plaire. Si vous aimez le rap, laissez-vous tenter, les chansons sont de bonne facture et le scénario sur une guerre de gangs reste un classique. Pour finir, si vous n'êtes ni l'un, ni l'autre (comme moi), eh bien ce film vous paraîtra moyen, voire mauvais. Certes, le réalisateur a de bonnes idées, mais le scénario est assez long à démarrer et la raison du combat n'est pas transcendante. Vous passerez le film à jouer au yoyo émotionnel, passant du «
Il est sympa ce film, les chansons sont bien écrites et il y a de bonnes idées de réalisation » à «
Non, mais sérieux, ces meubles sont de vraies personnes !? », «
Comment peut-on surjouer autant !? », «
What the fuck, qu'est-ce qu'il vient de se passer là !!? ».
Cette conclusion ne vous aidera pas, mais si vous êtes intrigué par le film, je ne peux que vous conseiller de le regarder, au moins pour son originalité dans le concept et pour vous faire votre propre avis.