[Yaoi] Stay Gold tomes 1 à 3

Synopsis :

La situation des Nakayama est compliquée. Bien qu'ils ne soient pas tous liés par le sang, les événements ont amené Yûji, son frère (Kô), son neveu (Hayato) et sa nièce (Kikka) à vivre sous le même toit. Malgré tout, la petite famille s'en est toujours tirée tant bien que mal, sans souci majeur. Du moins, jusqu'à ce que Hayato dise à son oncle qu'il l'aimait avant de l'embrasser. C'est ainsi que naît un véritable chaos amoureux, tantôt vu à travers les yeux d'un adolescent, tantôt vu à travers les yeux d'un adulte.

-Boy's Love-

Vous connaissez peut-être déjà la talentueuse Hideyoshico pour ses précédentes sorties françaises Gentleman and Sadistic, Rendez-vous à Udagawachou ou encore Nennen-Saisai. Cette année, elle a fait son grand retour dans le catalogue des éditions Boy's Love avec un titre qui ne m'a pas laissée indifférente : si je ne devais garder de 2019 qu'une seule série yaoi, ce serait sans hésiter Stay Gold.

Si le synopsis peut laisser sceptique au premier abord, le scénario va en réalité traiter avec beaucoup de justesse la problématique de la limite entre amour familial et romantique, comme on pouvait l'attendre de la mangaka. La série comporte une grande part de tranche de vie tournant autour de la vie quotidienne et des tourments amenés par l'adolescence, tout en se permettant d'esquisser des problèmes familiaux beaucoup plus profonds et dramatiques.

Même si on peut regretter la solution facile de ne pas lier les personnages par le sang dans le but d'éviter que leurs relations entre eux ne soient dérangeantes, le manga aborde finalement la notion de famille comme étant bien plus sociale que biologique. Ainsi, on nous dresse un tableau peu commun dans lequel une mère a abandonné à ses frères ses deux jeunes enfants pour pouvoir poursuivre son rêve : devenir pêcheuse en apnée. Les enfants ayant été principalement élevés par leurs oncles ces dernières années, il en ressort tout un questionnement de la notion de famille, finalement très floue pour eux... d'autant plus pour Hayato, puisque un autre sentiment vient se mêler à tout ça !

 
Derrière ses grands airs de collégien populaire et sûr de lui, Hayato ne peut que nous attendrir par son côté stressé, sa détermination et la tristesse causée par ses tourments de collégien, abordés avec sérieux. Les difficultés liées à l'adolescence sont bien développées dans la série, nous présentant un personnage qui se sent incompris, peu écouté, qui a besoin d'indépendance et de sentir que ses choix sont respectés par les adultes. C'est un personnage cohérent et sensible, auquel on s'attache sans aucun mal. On prend plaisir à le voir évoluer au fil des années et des tomes, l'autrice permettant de le découvrir ainsi sous plusieurs points de vue.

En effet, la narration est découpée de manière pertinente, nous offrant de nombreuses scènes du quotidien qui, une fois mises bout à bout, forment un ensemble cohérent, tout en changeant régulièrement le point de vue. Hideyoshico met en place un certain nombre de personnages secondaires intéressants, nous dévoilant peu à peu la façon dont des liens se sont tissés entre eux. Si l'histoire est principalement abordée du point de vue de Yûji et d'Hayato, l'intérêt apporté par ce système de narration se ressent lorsque on en apprend plus sur les personnages principaux, en les observant du point de vue d'une camarade de classe timide amoureuse d'Hayato, de la petite soeur Kikka ou encore de Hidaka, un ami proche de Kô secrètement amoureux de celui-ci depuis dix ans.

Comme à son habitude, Hideyoshico sait nous transporter dans ses histoires grâce à son trait doux, fin et parfois un peu brouillon. Les arrières-plans restent très simples, et l'ambiance calme et nonchalante reste la même au fil des tomes, mais on sent que son trait s'est encore précisé au fil du temps. J'avoue particulièrement accrocher à la façon dont elle représente les émotions de ses personnages : tout se ressent dans leurs yeux et cela suffit à en percevoir toute l'intensité.

 
Bien plus qu'une histoire d'amour, cette série soulève surtout en nous de nombreux questionnements : qu'est-ce qu'être adulte ? Qu'est-ce que la famille ? Qu'est-ce que l'amour ? A-t-on le droit de le ressentir pour un membre de sa famille ? Où se situent les limites ? ; Si aucune réponse explicite ne saurait être apportée, la mangaka décrit avec brio les tourments des personnages principaux à leur propos. Ils ne cessent de se remettre en question, de chercher à comprendre comment fonctionnent ces sentiments et testent diverses stratégies pour tenter de faire avancer leur relation... dans des sens différents.

Au vu de la grande différence d'âge des personnages (Hayato n'a que 13 ans au début de la série), j'appréhendais l'évolution de leur relation... Mais Hideyoshico a finalement su faire preuve de beaucoup de subtilité et de retenue dans le traitement de leurs sentiments. L'amour d'Hayato pour Yûji vient bouleverser le quotidien attendrissant de cette famille pas comme les autres, qui n'a aucune idée de la façon de gérer une telle révélation. L'aîné se trouve finalement être le plus gêné des deux, autant par les sentiments de son neveu envers lui que par le fait qu'il comprenne que ce dernier puisse également être attiré par les hommes. Aucunement renseigné, Yûji se pose des questions plus absurdes les unes que les autres, jusqu'à ce qu'il trouve le courage d'en parler avec Hayato. Face à la réponse du jeune garçon qui demande de but en blanc à son oncle s'il est amoureux de sa mère, Yûji s'étonne et s'inquiète de le voir reproduire un schéma similaire au sien, considérant ses sentiments pour sa "sœur" comme une erreur. Malgré tout, il s'habitude aux marques d'affection du collégien et ne manque pas de se sentir coupable d'en être troublé, tout en ayant des difficultés à reconnaître que celui dont il changeait les couches est en train de devenir un adulte.

Malheureusement, il risque de n'être que plus troublé par ce qu'annonce la fin du tome 3 ! Les choses sérieuses commencent, et la sortie en France du volume 4 de cette série se fait attendre avec impatience et nous laisse, tout comme le sont les personnages, préoccupé.e.s par de nombreuses questions.