Le manga
Don't Fake Your Smile de
AOKI Kotomi sort demain (5 mars) en France aux éditions
Akata. Nous avons eu la chance de pouvoir lire ce manga en avant-première et pour l'occasion, nous avons décidé de tester un nouveau concept en vous proposant directement plusieurs chroniques de nos rédacteurs sur cette oeuvre bouleversante.
Synopsis du tome :
Gaku était autrefois un garçon à problèmes, mais depuis sa rencontre avec la lumineuse Niji, il s’est assagi. Il vit désormais un quotidien de lycéen ordinaire, en compagnie de son meilleur ami, Hiyori. Gaku aime en secret Niji, devenue depuis vice-capitaine du club de judo. Mais aucun de ces trois-là n’était prêt à ce que la vie allait leur faire subir. Entre le coming out pudique de l’un, les méprises de l’autre, et surtout l’agression sexiste infligée à la dernière… Comment se construire à l’adolescence, entre douleur, secrets, culpabilité et faux-semblants ?
Avis de RedRubble :
Si j'étais au premier abord surprise de voir une série d'
AOKI Kotomi être publiée chez
Akata, m'attendant alors à un shōjo tout ce qu'il y a de plus classique, la surprise fut finalement au rendez-vous.
Don't Fake Your Smile a le mérite de sortir des clichés du genre, non seulement en nous annonçant d'emblée que l'un des personnes principaux est gay, mais surtout parce qu'il entend réellement traiter du sujet des agressions sexuelles ainsi que des troubles post-traumatiques qui en découlent.
Le titre évoquant un faux sourire fait rapidement écho : la mangaka met en scène une lycéenne au fort caractère qui avec un grand sourire et beaucoup d'aplomb, annoncera avoir subi une agression sexuelle à ses camarades de classe, assurant qu'elle va bien, allant même jusqu'à s'excuser de ne pas avoir pu coincer l'agresseur. Pendant que les rumeurs vont bon train à propos de ce qu'il se serait vraiment passé ce soir-là, Niji s'efforce de ne pas changer ses habitudes et reste en grande partie dans le déni face aux traumatismes causés par cette agression, qui sont pourtant bien présents. Entre suggestions et non-dits,
AOKI Kotomi parvient facilement, avec une narration sans surprise maîtrisée, à nous faire comprendre toute la douleur de Niji, et la façon dont ses récents traumatismes vont influencer sa vie quotidienne.
J'avais peur de voir cet événement être pris à la légère ou sous le mauvais angle, mais c'est tout le contraire ici, le traitement du sujet différant en bien des points de ce à quoi on peut s'attendre en lisant du shōjo. Toute la pertinence du scénario réside dans le fait qu'il tourne justement autour de la reconstruction du personnage de Niji, qui devra gérer à la fois ses peurs, le regard des autres, et les sentiments de ses amis. Le manga aborde donc un sujet difficile, mais le fait avec beaucoup de retenue et de pudeur, ce qui lui permet à mon sens de pouvoir être recommandé à un jeune public malgré la gravité du thème traité.
Une grande partie du tome nous étant présentée depuis le point de vue de Gaku, on découvre ici le côté plus sentimental de l'histoire, le jeune garçon ayant des sentiments pour Niji sans jamais lui avoir avoués. De quiproquos découlera de la jalousie, et Gaku aura tendance à tout ramener à lui au lieu de porter son attention sur celle qu'il aime et qui vient d'être victime, son égoïsme renforçant sa culpabilité déjà présente. Quant à Hiyori, le troisième personnage principal qui fait son coming-out à Niji dès le début du tome, sa présence même dans une série shōjo révèle bien des choses sur la portée que l'autrice souhaite donner à celle-ci. Et oui, il y a des personnages gays dans les mangas comme dans la vie, ce n'est pas réservé aux boy's love ! Même si cet aspect ne se limite pour le moment qu'à servir la mise en place d'un triangle amoureux, je ne doute pas qu'il sera développé dans les tomes suivants, dont j'attendrais la sortie avec impatience. Quelle sera la réaction de Gaku face au coming-out de son ami ? Comment évoluera Niji dans son long chemin vers la reprise de confiance en soi, tandis que l'arrivée d'un nouveau personnage dans le deuxième tome risque à nouveau de tout bouleverser...?
Avis de neoffreeman :
Si le tout début de
Don't Fake Your Smile pouvait annoncer un shôjo assez classique à base de quiproquos et malentendus, l'événement clôturant le premier chapitre redistribue toutes les cartes.
On dit souvent que suggérer une douleur est plus efficace que de la montrer ou de la subir. C'est justement sur cela que joue
AOKI Kotomi. Ce qu'a subi la jeune Niji ne nous étant pas expliqué clairement, nous sommes comme les camarades de classe de la jeune fille et nous imaginons le pire pour elle, même si celle-ci nous affirme que ce n'est rien.
Sous ses airs acariâtres, Gaku s'avérera être un très bon ami qui, malgré quelques maladresses, parviendra à réconforter la jeune fille dans ses instants de trouble même si son amie ne peut répondre à ses attentes pour le moment. Le couple en est d'autant plus touchant.
Mais le pire reste à venir, puisque les quelques lignes en fin de tome nous promettent une confrontation qui fait froid dans le dos !
Avis de Lorya :
Un début assez basique, des personnages paraissant un peu cliché : la fille grizzli qui fait du judo et deux garçons qui semblent se disputer le cœur de la belle... Jusqu'à une révélation puis un cruel événement, auquel je ne m'attendais vraiment pas. S'ensuit alors nombre de malentendus, majoritairement de la part de Gaku, timide amoureux qui n'a pas su révéler ses sentiments, et qui ramène un peu trop tout à lui et parvient difficilement à voir et comprendre ce qui se passe devant ses yeux. Malgré tout, il fait de son mieux et son comportement évolue tout au long du tome, pour se tourner un peu plus vers Niji.
Don't Fake Your Smile. Feindre un sourire alors qu'un trouble subsiste au plus profond de nous, sans forcément en avoir conscience. Je trouve que l'autrice met bien en scène ce choc qui bouleverse tout un être, à travers des scènes subtiles et délicates, ce qui le rend abordable pour un jeune public. Elles font réfléchir le lecteur, pour le pousser à réagir et à comprendre de lui-même ce qui a pu se passer. Et si un sourire cachait une terrible blessure...