Attention, cette chronique porte sur une œuvre destinée à un public averti car elle contient des scènes particulièrement violentes ou sexuellement explicites.
Sa couverture aux tons pourpres était beaucoup trop à mon goût pour que je passe à côté !
The Teijo Academy est le second manga de
NATSUSHITA Fuyu à paraître en France, après
Le maître de maison est un alpha. N'ayant pas eu l'occasion de lire son précédent titre, c'est à travers cette sortie plus récente que je découvre l'autrice, dont l'excellent travail s'avère être tout sauf une déception !
Synopsis :
Harutaka, lycéen oméga, se sépare soudainement de son petit-ami Nachi. Celui-ci vient d'une famille d'hommes politiques depuis plusieurs générations, et on attend de lui qu'il reprenne le flambeau ; afin de se concentrer sur son objectif, il quitte Harutaka et entre à l'académie Teijo, où a étudié sa famille. Harutaka, toujours profondément amoureux de Nachi, décide de son côté de s'inscrire également afin de le soutenir. Mais dès les premiers jours, il réalise qu'il ne s'attendait pas à tomber dans un environnement aussi élitiste, où tout le monde obéit au doigt et à l'oeil à un groupe de quatre lycéens, riches, beaux et venant de familles célèbres, qui font la pluie et le beau temps à l'école.
-Boy's Love-
Celles et ceux qui suivent mes chroniques yaoi savent que je suis loin d'être une fan d'omegaverse. Pourtant,
The Teijo Academy est parvenu à rééquilibrer la balance ! Même si l'on retrouve sans mal une grande partie des éléments classiques de ce genre de manga, ils ne sont pas exploités de façon à nous servir ces habituelles scènes de sexe gratuites et relativement peu consenties, au nom des "chaleurs" d'un oméga, aussi peu crédible qu'excessivement dégoulinantes. Ainsi, à part dans les chapitres bonus, le manga ne nous offre pas en réalité de véritables scènes de sexe explicites, alors même que tout le scénario semble graviter autour de ce thème.
Car le sexe apparaît ici pour les protagonistes comme le moyen le plus facile et le plus rapide de gravir les échelons sociaux. À l'académie Teijo, on ne verse pas dans le sentimentalisme : tout le monde couche avec tout le monde dans le but de se faire des relations haut placées et, avec de la chance, de remporter la "compétition sociale" en étant sélectionné pour faire partie des Quatre Légendaires : les rois de l'école. On peut difficilement trouver plus élitiste que l'univers de
The Teijo Academy : seuls les meilleurs arriveront jusqu'au bout et, pour y parvenir, rien ne vous oblige à faire preuve d'honnêteté ni de bonne foi.
Si la toile de fond reste classique et ne surprend pas vraiment, elle joue très correctement son rôle et s'avère mise en place avec adresse et pertinence. Riche de détails et construite de façon cohérente, elle place les personnages dans un milieu où ils évoluent avec naturel. La narration se révèle claire, plutôt bien maîtrisée, mais aussi très dense, surtout au vu de l'épaisseur du volume. En plus de bien doser le développement de l'histoire,
NATSUSHITA Fuyu a donc produit un réel effort de construction du scénario, qui a su aller au delà de mes attentes en la matière. Ambitions, sentiments et désirs s'entremêlent, créant un environnement plus propice à la compétition qu'à la romance, complexifiant les relations entre les personnages, intégrant et ajoutant comme une "surcouche" à la pression sociale déjà présente dans tous les aspects de la société omegaverse.
Mais notre personnage principal, lui, n'a que faire de tout cela. S'il est entré à Teijo, c'est uniquement par amour pour son ex-copain
Nachi, fils d'un éminent politicien. Trop accroché à une relation à laquelle Nachi a pourtant officiellement mis fin suite aux pressions de son père,
Harutaka devra apprendre à vivre pour lui-même, tant pour s'épanouir que pour essayer de survivre dans cet environnement sans pitié. Mais tandis que l'étudiant s'efforce de se détacher de son ex-copain et qu'il se rapproche peu à peu de son senpai Aoki, l'autrice nous suggère que cette histoire d'amour n'est peut-être pas tout à fait terminée... Une question à suivre dans le second tome.
Sans trop de surprises, j'ai apprécié le style de l'autrice : les dessins sont beaux et soignés, tout comme le look très classe des personnages, qui s'intègre parfaitement à l'ambiance de l'académie avec ses décors somptueux et travaillés. Les scènes
hot ressortent encore plus par leur rareté, sont sensuelles et bien dessinées. Cependant, j'ai été très étonnée par le choix de la mangaka de qualifier ses personnages de "lycéens" alors que ceux-ci, par absolument tous leurs aspects - que l'on observe leur physique, leur manière de se comporter ou bien leur vie quotidienne - apparaissent sans l'ombre d'un doute comme des étudiants dans leur vingtaine. Mais, si ces personnages se révèlent très adultes, ils n'en restent pas moins attachants, notamment Harutaka et son caractère bien trempé.
On retrouve également une multitude de personnages secondaires aux caractères et aux physiques tous différents, mais suffisamment développés pour être convaincants et un minimum attachants. Bien qu'incarnant certains clichés du genre (on pense notamment au colocataire Tsuji - l'oméga en chaleur par définition - ou au frivole président des 4L, Hasunomiya), ils parviendront aussi à nous surprendre. Surtout, ils complètent à merveille la toile de fond de l'académie que l'on découvre dans ce tome et lui donnent tout son sens.
Point bonus pour le chapitre flash-back nous ramenant à la petite enfance d'Harutaka, lors duquel nous découvrons qu'il est le fils des deux personnages du précédent one-shot de l'autrice,
Le maître de maison est un alpha. Si je devais citer l'un des seuls avantages de l'omegaverse, mis à part la fin de la distinction sociale entre les genres puisque celle-ci se transpose sur les castes, c'est bien de pouvoir aborder avec une grande facilité la parentalité au sein d'un couple homosexuel puisqu'elle y est totalement normalisée. En quelques pages, la mangaka nous offre un chapitre bonus rafraîchissant, presque aux antipodes du reste de ce tome, avec un couple de jeunes parents aimants et plein de bienveillance, ainsi que la présence d'un très jeune Harutaka qui ne fait que renforcer notre attachement au personnage.
Ainsi,
The Teijo Academy nous offre, à mon sens, tous les éléments nécessaires à un bon début de série boy's love, bien que l'on sente que celle-ci sera certainement assez courte. Un scénario cohérent, des personnes charismatiques en queue-de-pie et un trait fin et soigné qu'on ne peut qu'admirer... Sincèrement, que demander de plus ? La tension accumulée tout du long de ce volume, tant sociale que sexuelle, annonce une suite prometteuse. Une lecture qui restera pour moi certainement le meilleur titre omegaverse de l'année !