Synopsis :
Ces derniers temps, Takaya Kikuchi n’est pas en veine. Après qu’un détective privé nommé Akihito Yoshino a mis au jour sa liaison avec la femme de son patron, il a perdu son emploi d’agent immobilier. Tenant pour responsable le taciturne détective, il décide de lui rendre une petite visite afin de le forcer à l’engager pour réparer le tort qu’il lui a fait. Forcément, la rencontre ne se passe pas aussi bien que prévu, mais il ne va pas se laisser décourager pour autant !
-Taifu-
Ce samedi, découvrons le one-shot
FILES de
SATO Tsubame, première oeuvre de cette autrice sortie en France, disponible chez
Taifu depuis jeudi dernier !
Côté romance, le scénario ne brille pas par son originalité, mais classique n'est pas pour autant synonyme de désagréable. Malgré la réticence du détective, Kikuchi l'accompagne dans son travail et tente d'apprendre à le connaître, ce qui va s'avérer complexe étant donné le caractère extrêmement froid et distant de Yoshino. Les informations sur son passé nous sont données au compte-goutte, et on apprend à le connaître en même temps que Kikuchi, qui se rendra vite compte de son attirance pour lui sans pour autant comprendre à quel moment il est tombé amoureux. Au fil des enquêtes, les deux hommes se rapprochent, commencent maladroitement à s'attacher et à prendre soin l'un de l'autre, et l'on sent qu'ils se portent de la tendresse bien que le détective laisse rarement sa sévérité de côté. La narration laisse malheureusement assez peu de place aux pensées des personnages, et ce manque d'introspection s'accompagne à mon sens d'un manque d'intensité dans l'expression de leurs émotions, tant au niveau des dessins que des dialogues.
Les dessins, justement, sont assurés et gardent un style plutôt passe-partout, à l'image du chara-design des protagonistes principaux. Si le style de
SATO Tsubame est agréable à l'oeil, je n'y ai pas retrouvé ce "petit quelque chose" qui me charme et me fait accrocher au dessin d'une mangaka. Les expressions des personnages me paraissent trop sérieuses, trop carrées, trop "professionnelles" peut-être, et le rendu de leurs émotions est globalement assez plat. Si ce style reste indéniablement beau et très adapté pour représenter le visage froid de Yoshino, les autres expressions donnent parfois l'impression de manquer de sincérité.
Un des gros points forts de ce manga est sans aucun doute d'être parvenu, en un unique tome, à développer sa petite équipe de personnages secondaires plus originaux et intéressants les uns que les autres, auxquels on s'attache même plus rapidement qu'à Kikuchi et Yoshino ! J'ai peut-être tendance à me répéter au fil des chroniques, mais rencontrer dans un boy's love des personnages féminins un minimum développés et jouant un véritable rôle dans l'histoire, est trop rare pour ne pas être souligné.
Minami, la secrétaire et assistante de notre détective, est aussi drôle que rafraîchissante et on s'attache très vite à elle, notamment en découvrant sa relation compliquée avec ses parents, à qui elle n'a pas fait son coming-out et qui la considèrent donc toujours comme un garçon. Un étage au-dessus de leurs bureaux, on découvre l'équipe haute en couleur de l'entreprise qu'a montée Rino, ancienne actrice porno. Entre une mère célibataire qui ne parvient pas à gagner assez pour nourrir ses enfants, une femme trans autrefois pompier et une masseuse qui doit se reconvertir à cause de son âge, cette équipe à l'ambiance familiale donne une réelle touche originale au manga sans pour autant en faire trop, restant dans un ton tout aussi retenu que le reste du one-shot.
Mais au-delà de ça, si ces personnages peuvent surprendre au premier abord, elles font en réalité écho à la volonté de Rino de créer "une entreprise dans laquelle les gens se sentent bien, quel que soit leur CV". Premier personnage sur lequel Yoshino enquêtera assisté de Kikuchi, elle a sû se montrer touchante par sa détermination malgré le fait que cette partie du scénario soit assez expéditive. Elle amorce une réflexion très discrète sur le monde du travail, qu'on retrouvera à plusieurs reprises tout le long du tome, mettant en lumière tantôt la dure réalité de certains métiers malgré le calme apparent, tantôt leur côté profondément humain. Kikuchi, de son côté, regrette sa jeunesse difficile qui l'a amené à placer le travail avant les études et ainsi à "rater sa vie d'adulte", aujourd'hui au chômage et sans logement. Si la thématique reste discrète et est loin d'être traitée en profondeur, elle n'en donne pas moins un côté mature à ce one-shot, qui nous permet tout de même de découvrir l'envers du décor d'un cabinet de détective privé.
La narration est bien rythmée, nous permettant de suivre à la fois l'évolution de la relation des deux protagonistes, leurs avancées personnelles et les enquêtes en fond, sans pour autant avoir l'impression que les choses se déroulent trop vite. Point bonus pour la présence du chat, qui en plus de nous attendrir, se trouve être l'élément déclencheur de situations faisant avancer le récit, amenant les personnages à se rapprocher ou, au contraire, à leur éviter de faire des choses qu'ils regretteraient par la suite. La fin nous laisse sur un sentiment d'inachevé, tant du côté de leur amour naissant que de celui des problèmes personnels de Yoshino, qui restent en suspens, terminant sur une touche mélancolique. Voilà une fois de plus un scénario qui nous laisse sur notre fin et qui aurait mérité un second volume.
Ainsi,
FILES est un one-shot qui sort des standards en nous offrant tout une panoplie de personnages secondaires à la personnalité et au design intéressants, tout en nous faisant découvrir les coulisses d'un cabinet de détective dans lequel on verra naître une histoire d'amour tendre et plutôt maladroite entre deux hommes à la personnalité bien opposée. Une lecture agréable, très soft et qui change un peu, alors pourquoi ne pas vous laisser tenter !