Arte est un anime qui aborde les thèmes de l'art, l'histoire et la féminité, la série étant diffusé cette saison, nous vous proposons de suivre notre avis au fil des épisodes.
Synopsis :
Italie, Florence, début du 16e siècle. L’époque était au foisonnement culturel. Au milieu de toute cette effervescence on retrouve Arte, une jeune femme pas comme les autres. Arte, quel prénom évocateur pour une jeune fille portée par sa passion dévorante pour le dessin et vivant en pleine Renaissance italienne ! Mais alors qu'elle essaye d’intégrer un atelier de peinture, sa condition de femme lui revient alors à la figure telle une paria...
Une femme peintre ? Une fille apprentie ? Est-ce vraiment possible en pleine Italie du 16e siècle ?
- Komikku -
Sommaire :
La condition des femmes est un sujet évolutif : on peut se placer à différents moments de l'histoire de l'humanité, et elle occupera toujours une position différente vis-à-vis de la société. Il semblerait que c'est ce dont il est ici question : la condition des femmes au XVI
e siècle pendant la Renaissance italienne.
Après avoir visionné le premier épisode, cet anime peut selon moi avoir plusieurs niveaux de lecture. Le spectateur peut y suivre l'aventure d'une
jolie jeune fille issue d'une famille florentine relativement riche, qui a pour ambition de devenir peintre malgré les obstacles qui lui barrent la route.
Toutefois, on y voit aussi abordé le sujet de la condition des femmes. L'histoire sert à décrire des faits, des moments du passé, soit pour les mettre en évidence, soit pour s'en servir de points de comparaison. Or, il n'est pas anodin dans notre monde moderne, et qui plus est dans la société japonaise, de mettre la condition des femmes au centre d'une oeuvre comme un manga ou un anime. On peut donc s'interroger : cette série veut-elle simplement raconter, au travers des yeux de son personnage, la vie d'une femme à cette époque, ou souhaite-t-elle servir de point de comparaison pour mettre le doigt sur des lacunes de notre société actuelle ?
Concernant cet épisode en particulier, il est beau, point qui a évidemment son importance pour une série abordant le sujet de l'art pendant la Renaissance. Pour l'instant, on peut se réjouir d'avoir des plans d'une très bonne qualité graphique dès le début de l'épisode, c'est d'ailleurs ce qui frappe les yeux.
Le cadre est bien établi dès ce premier épisode, on voit immédiatement les enjeux autour du personnage principal, ses ambitions et objectifs. Il est question d'une jeune fille,
Arte, qui souhaite devenir peintre et travailler de ses mains. Néanmoins, la société dans laquelle elle vit répugne à laisser une femme exercer cette profession. Alors que sa mère, veuve, lui trace un avenir de bonne épouse, elle en décide autrement et part à la recherche d'un maître qui acceptera de la prendre en tant qu'apprentie. A la fin de l'épisode, elle deviendra officiellement l'apprentie de
Leo, un peintre à la personnalité originale, et laissera derrière elle sa vie de noble.
Si l'histoire nous montre de nombreux exemples de femmes peintres lors de la Renaissance, la société et la façon dont était organisé le système de corporation ne leur permettait cependant jamais de devenir maître. Elles étaient vouées, pour la plupart, à rester apprenties d'un atelier dont les oeuvres seraient toujours signées du nom du maître. Elles étaient souvent fille de peintres, et se mariaient avec d'autres peintres, mais leur statut ne pouvait évoluer guère plus loin.
Après nous avoir montré la situation d'une femme face à une profession monopolisée par les hommes, ce premier épisode met en valeur une seconde opposition : celle entre la vie d'artisan et de noble.
Au final, je suis assez satisfait des questions proposées par la série, ainsi que de l'ambiance visuelle et sonore.
Arte commence sa nouvelle vie en tant qu'apprentie. Il est rassurant de voir que l'anime est toujours aussi beau. Le thème de cet épisode est l'égalité homme/femme : une femme peut-elle exécuter les mêmes tâches que les hommes ? Cet épisode insiste sur le fait que oui, et qu'une femme peut même parfois être meilleure.
Pour un anime historique, je trouve que le contexte et les détails liés à cette période sont assez biens retranscrits. En effet, on l'a vu dans l'épisode précèdent, les peintres ne travaillent pas forcement sur toile mais sur des morceaux de bois comme il était courant de le faire à cette époque, on peut citer par exemple l'oeuvre bien connue
"Les époux Arnolfini" de Jan van Eyck. Le système des corporations est assez bien défini, tout comme le passage du statut d'apprenti à celui de maître, bien que les femmes au XVIème siècle ne pouvaient pas accéder à ce rang. De plus, au Moyen-Âge, certaines parties du corps avaient une signification particulière dans l'art ou dans les mœurs. Ainsi le fait qu'
Arte relève sa robe pour exécuter sa tâche en pleine rue est à la fois une atteinte à la pudeur et un signe de sa volonté à ne pas se laisser dompter par les codes sociaux. A l'inverse, l'aspect que je pense exagéré pour donner de la consistance au sujet concerne les refus assez violents que reçoit
Arte de la part des maîtres.
Angelo, en plus d'être un personnage attachant, sert la narration. Le fait que son père soit un administrateur de la mairie de Florence donne une idée du contexte politique en quelques images. Au travers de sa gentillesse envers la gente féminine, on peut voir une comparaison entre
Arte, sa volonté de s'en sortir par elle-même, couplée à son désir de faire ses preuve en exécutant des tâches similaires à celles des hommes, et la réaction nettement opposée de la fille qui fait tomber ses fruits, qui, elle, est plutôt séduite et encline à se faire aider. C'est d'autant plus plaisant de voir que l'histoire sait se détacher de son personnage éponyme pour raconter un récit plus large.
Tout au long de l'épisode, comme une sorte de fable, la narration nous montre à divers moments la différence de traitement entre les hommes et les femmes, pour finalement nous faire comprendre qu'une femme peut aussi réaliser toutes ces tâches par elle-même. Tout ceci est additionné à un message plus général qui est que lorsque l'on accompli quelque chose par nous-même, il est d'autant plus satisfaisant d'en constater le résultat : le dur labeur paye et enseigne.
Alors que l'épisode précèdent mettait en valeur un principe d'égalité hommes/femmes, celui-là met au contraire l'accent sur les différences entre ceux-ci, et sur ce que peut être la féminité. En effet,
Arte n'a jamais été aussi proche physiquement d'un autre homme que
Leo. Dès lors, elle remarque toutes leurs différences physiques.
Bien que le terme "courtisane" soit étymologiquement utilisé pour désigner une personne qui demeure à la Cour d'un souverain, ici, le récit choisit une définition normalement plus tardive que l'époque de l'anime : une prostituée de luxe, une femme qui charme des hommes fortunés pour se faire entretenir.
C'est aussi l'occasion pour
Arte de ressentir ses premiers sentiments "amoureux", élément qui, je l'espère, ne transformera pas la série en un anime à l'eau de rose. A la fin de l'épisode, la jeune fille semble troublée par les paroles de
Leo à propos de ses qualités et de ce qui fait d'elle une femme intéressante. Toutefois, on peut aussi simplement y voir une autre affirmation de sa féminité, qu'elle a été contrainte de cacher en début d'épisode.
Cet épisode ne manque pas non plus de références historiques : on y retrouve le concept du mécénat, et de l'humanisme lié à la période de la Renaissance. Le mécénat est une pratique proche du sponsor moderne : un artiste se fait financer par un noble, et en contrepartie il se voit commander des oeuvres. Je suis agréablement surpris que la série ose nous montrer des scènes telles que celle de l'autopsie. Durant le Moyen-Âge, comme l'explique le récit, les pratiques comme celles-ci étaient interdites. Mais la Renaissance est la période de la redécouverte de l'être Humain, et cette scène témoignage du courant humaniste de l'époque, qui développe une pensée critique où l'expérience scientifique permet de dégager une connaissance libre de préjugés.
L'un des passages nous permet d'apprendre une notion d'art à travers les yeux de
la protagoniste : en plus de nous apporter une information, le tout se déroule de manière naturelle et fluide. Ainsi, l'histoire n'est pas seulement centrée autour de notions féministes, qui ne sont en fait qu'une trame de fond dans ce récit historique dont la vocation première reste de nous parler d'art.
L'amour est le sentiment le plus complexe et le plus indomptable et c'est tout le propos de cet épisode. Le spectateur va suivre
Arte et ses sentiments envers
Leo, ainsi que son apprentissage de l'application dans son travail.
Le sujet de la prostitution, y compris "de luxe", est abordé avec finesse et habileté. Dès la rencontre du spectateur et d'
Arte avec
Veronica, cette dernière demande "serais-tu innocente au point de ne pas connaître mon métier ?". Cette question, qui s'adresse spécifiquement à
Arte, est aussi une manière de questionner le spectateur, pour qu'il y réponde de lui-même, sans que les personnages soient explicitement obligés de décrire et de parler de prostitution.
Plus tard
Veronica fera en sorte de montrer à
Arte que l'amour est un poison pour le travail. Selon elle, ce serait un sentiment qui implique la dépendance, qui mène vers la déchéance (la prostitué déchue) ou la souffrance (l'homme souffrant de ne pas pouvoir voir Veronica). J'y vois là une métaphore pour montrer à
Arte que, lorsqu'on s'applique à faire quelque chose, on ne peut pas se permettre d'être troublée, que s'appliquer sur une tâche nécessite concentration et attention. C'est pourquoi dans son métier,
Veronica ne peut pas se permettre d'éprouver de l'amour ou des remords. Il en va de même pour
Arte qui ne peut pas se laisser dominer par l'amour qu'elle semble ressentir pour
Leo : non seulement elle doit se contrôler pour reprendre en main sa vie et son travail, mais se laisser aller à ses sentiments signifierait que Leo aurait tout pouvoir sur elle.
La fin de l'épisode marque la fin de la perte de contrôle d'
Arte, qui peut désormais se consacrer à sa vie et son art.
Arte semble avoir réussi à maîtriser ses sentiments et retrouvé un comportement normal. C'est l'occasion pour le récit d'intégrer un nouveau personnage. À l'image de
Leo,
Angelo et
Veronica, les personnages de cet anime ne viennent pas seulement enrichir l'action et l'intrigue, ils représentent aussi les différents types d'individus et acteurs de la vie florentine de cette époque. Monsieur
Ubertino, archétype du riche marchand et notable de la cité de Florence, sera l'obstacle qui fera grandir
Arte dans son art et sa maturité. Sa seule présence permet d'apporter de la consistance à l'épisode et d'obtenir un morceau d'histoire de l'époque de la Renaissance en Italie.
Cet épisode met en scène
Arte qui va apprendre à négocier, à donner une valeur vénale à ce qu'elle produit. Car, pour elle aujourd'hui, la peinture n'est plus un passe-temps mais bel et bien un métier dont elle doit apprendre les tenants et aboutissants. On peut y voir là une leçon sur le passage à la vie adulte. L'apprentie est confrontée à
Ubertino en matière de négociations. Il y a un double enjeu important pour
Arte, qui fait face à une personne qui ne voit l'art que par le bénéfice qu'une toile peut lui rapporter : d'une part, elle va devoir convaincre un négociateur chevronné de modifier une commande, d'autre part elle va devoir surmonter le fait que
Ubertino ne prend pas de plaisir à l'art. Une mentalité qui subsiste encore de nos jours.
L'épisode nous permet aussi d'en apprendre plus sur
Leo et son passé. Ce qui est frappant, c'est de voir à la fois les valeurs et les obstacles communs à
Arte et son maître, mais aussi l'opposition franche entre leur milieu social d'origine :
Leo étant issu de la classe inférieure de la société, pire, il était mendiant ; alors que
Arte vient, elle, de la noblesse. Au moment même où
Arte comprend que
Leo choisit d'investir son argent pour les meilleurs outils possible plutôt que pour ses plaisirs, le spectateur peut, lui aussi, apprendre une leçon. Dans la vie il faut faire des choix, tout n'est pas acquis et il faut parfois savoir se restreindre pour pouvoir profiter ailleurs. En ce qui concerne le fait que Leo impose le jeûne à son apprentie, n'est ce pas là une manière d'enseigner à
Arte ce que c'est de ne pas pouvoir se nourrir à sa faim ?
Chaque épisode de cet anime apporte un élément historique, une technique artistique et une morale et celui-ci n'échappe pas à la règle. On retrouve le système de corporation avec la guilde ou le Calcio florentin pour l'élément historique ; la peinture sur mortier et les fresques pour la technique artistique. Quant à la morale, l'épisode fait passer un message qui constitue un des fils rouge de la série : la persévérance paye.
L'objectif dans l'épisode n'est pas de montrer comment
Arte se dresse au même niveau que les hommes, voire meilleure. Toutefois l'anime n'a pas la prétention d'élever la femme au-dessus de l'humanité. Ici, il est simplement question d'être accepté par ses paires malgré ses différences. Cette hypothèse est confirmée par le fait qu'
Arold dit à
Leo qu'
Arte lui ressemble justement parce que lui-même a rencontré des difficultés à se faire accepter à cause du fait qu'il était mendiant.
Arte et
Leo souffrent tous les deux d'une différence qui les met à l'écart et, par leur persévérance, ils se font accepter des autres.
On voit justement qu'
Arte commence à gagner le respect de ses camarades : au début de l'épisode, il n'y a pas qu'Angelo qui prend sa défense, mais aussi d'autres apprentis qui ont reconnu ses capacités. Le moment fort qui montre qu'elle progresse sur cette voie réside dans la fin de l'épisode, quand elle est acceptée dans l'équipe pour jouer au Calcio. D'une part, elle est traitée comme tout un chacun quand on lui promet qu'on ne lui fera pas de cadeau. D'autre part, quelle image plus forte que lorsqu'on intègre une équipe sportive ? Elle a finalement gagné le respect ou au moins la confiance de ses semblables apprentis, elle fait désormais partie de l'équipe.
L'épisode nous montre aussi que Florence n'est pas qu'une ville d'art et de culture pendant la Renaissance et on le découvre grâce à une mise en scène géré de main de maître. On peut deviner que la cité s'intègre dans un ensemble politique plus complexe, Venise et Rome étant des villes tout aussi importantes à cette époque. Lorsque le Pape est mentionné ou quand un prêtre fait des remontrances à quelqu'un qui ose se battre devant une église, la chose religieuse est un point essentiel à cette période. En effet, flatter l'Église par des dons ou de grandes constructions était un moyen d'attester que telle ou telle ville avait des moyens conséquents et était plus riche que les autres. Il est réellement plaisant de pouvoir observer un anime qui porte autant de détails aux éléments historiques et culturels qu'il intègre à son récit.
Pour cet épisode il ne semble pas y avoir de "morale" particulière qui se dégage, la série s'apprête à changer de cadre pour aller vers la cité de Venise. Ce changement constituant l'axe principal de l'épisode.
Bien que l'anime brille par son sens du détail et la pertinence de ses scènes, il y en a une qui m'a laissé perplexe. L'illettrisme, propre au Moyen-Âge, est mis en valeur en introduisant
Dacia, un personnage qui semble relativement proche d'
Arte et que l'on revoit au cours de l'épisode. Toutefois, ce personnage tombe comme un cheveux sur la soupe, je m'en suis même demandé si je n'avais pas raté un épisode. Pour un anime de cette qualité, ça m'a troublé que le personnage soit mis dans le scénario en faisant comme s'il avait toujours existé.
Yuri, un riche marchand vénitien, propose à
Arte de devenir la portraitiste de sa famille et d'être la perceptrice de sa nièce. A défaut de nous présenter une technique artistique en particulier, la leçon d'
Arte réside dans le fait de savoir quelles opportunités seraient les meilleures pour elle. Pour un peintre à la Renaissance, les voies sont multiples, certains choisissent d'ouvrir un atelier, mais le destin d'autres est de devenir les peintres attitrés à de grandes familles ou de peindre pour la cour des souverains européens. Léonard de Vinci a entre autres été peintre à la cour du roi de France, Francois Ier.
Arte finira par plier lors d'une scène qui m'a particulièrement marqué par son sens du détail. En effet, la dernière scène montre beaucoup de petites techniques utilisées en négociation, allant jusqu'à travailler minutieusement les expressions faciales des personnages.
L'une des conditions au départ d'
Arte est le fait que
Yuri doit venir en aide à
Lusanna, la fille du maître de
Leo, dont le mari est décédé. Le but de sa venue à Florence étant de récupérer le montant de sa dot. Plusieurs éléments intéressants sont abordés avec ce seul personnage, non seulement on en apprend plus sur Leo et son passé, mais aussi sur la femme dans le mariage et la filiation au 15ème et 16ème siècle. Je ne saurai pas affirmer avec certitude si les pratiques de la dot dans l'anime correspondent à celle de Florence à cette époque, mais il est à noter que selon la région dans laquelle on se trouve, c'est soit à la femme, soit à l'homme d'apporter la dot, qui constitue normalement une sorte de garantie pour la femme en cas de rupture du mariage. Les mariages, souvent conclus par alliance que par amour, faisaient que les biens du couple étaient mis en commun et sous la responsabilité du mari, la dot étant réservée à la femme. C'est pourquoi cette somme semble aussi vitale à
Lusanna.
J'ai hâte de voir le changement de décors entre les deux cités. On se souvient de Florence comme épicentre de l'art Italien, alors que Venise brille par son modèle de la République marchande. Aussi de nouvelles opportunités pour
Arte.
Cet épisode apparaît comme une transition entre la vie florentine et l'arrivée à Venise pour
Arte. À l'instar de cette dernière qui prend la mer pour changer de cadre de vie, le paysage présenté au spectateur est lui aussi bien différent. On aperçoit de nouvelles infrastructures et une nouvelle architecture. Le soin apporté aux détails nous permet d'apprécier une réelle différence entre les deux citées italiennes.
Un certain nombre d'éléments historiques est timidement mis en avant. On retrouve une référence à la piraterie car, bien loin des Caraïbes, il ne faut pas oublier que dès qu'il y a des lignes commerciales maritimes ou terrestres, des individus vont forcément tenter de détourner les cargaisons. Ainsi, Venise et Constantinople, en tant que comptoirs commerciaux privilégiés de la Renaissance, sont des cibles privilégiées de la piraterie. Une pratique qui existe depuis l'antiquité. Grâce au commerce duquel elle dépend, Venise accueille bon nombre de commerçants, de cultures bien différentes, et c'est justement ce qui contribuera à son essor. Autre point abordé durant la traversée en direction de Venise, c'est la pratique du duel et le fait de porter une lame sur soi. Il y aurait tant à dire sur l'escrime italienne à la Renaissance et ce besoin constant de porter une arme en cas de tentative d'assassinat ou pour défendre son honneur. L'escrime est introduite par le duel entre le matelot et
Yuri, mais il faut savoir que c'est à cette époque qu'elle apparaît comme un loisir.
Arte, qui est pourtant un personnage animé, apparaît comme étant bel et bien humaine. Lors de la traversée, elle rumine sur les dernières paroles de Leo et nous montre qu'en l'absence de la personne qui pourrait lui apporter des réponses, il est si simple d'avoir des conclusions erronées. Heureusement,
Yuri, qui détient des informations supplémentaires, vient lever les doutes de la jeune fille.
Arte le dit elle-même : la meilleure manière de lever le doute aurait été de poser la question directement à
Leo. S'il y avait une sorte de morale dans cette épisode ce serait ça : il vaut mieux demander et clarifier plutôt que de laisser un jugement biaisé nous tourmenter.
Bien que cet épisode puisse paraître léger en terme de morale, il n'en reste pas moins riche en éléments historiques. Son importance dans le récit n'est pas à négliger puisqu'il fait charnière entre deux arcs de la vie du personnage principal. Plus qu'un changement de lieu de vie et de travail pour
Arte, c'est un changement de chapitre pour le spectateur.
Cet épisode est exclusivement centré sur la relation entre
Arte et
Catarina, la nièce de
Yuri. On retrouve tout de même quelques éléments de référence à l'Histoire, par exemple le rôle des servants par rapport à ceux qu'ils servent, ou encore un clin d'oeil au fait que, pour montrer leur richesse dans l'Italie de la Renaissance, les nobles commandaient des oeuvres au profit de l'église, d'où le fait que les monument religieux italiens soient si bien fournis et qu'
Arte veuille en visiter un pour s'inspirer.
D'un côté,
Arte découvre son rôle de préceptrice tandis que le spectateur en apprend plus sur la petite
Catarina. L'épisode entier est un écho au rapport entre
Arte et son art. Dès la première scène, l'anime fait preuve d'un grand sens du détail en mettant en scène la déception de
Catarina envers ses parents désespérés de son comportement. On observe alors une jeune fille frustrée, restreinte par la vision étriquée de ses parents, une mère aimante mais déçue et un père exigeant et sévère. Le récit nous montre vite que
Catarina n'a pas besoin d'enseignements, et on s'interroge : ne serait-ce pas plutôt les parents de la fillette qui auraient besoin d'un apprentissage afin d'accepter leur fille comme elle est, avec les passions et les ambitions qui l'accompagnent ?
Certes la passion est différente, mais le cheminement semble le même : une fille qui s'intéresse à un art ou une pratique dont les métiers sont essentiellement pratiqués par des hommes ou des servants, et dont la passion est refoulée par les parents, qui ambitionnent pour elle un futur de femme à marier. Toutefois, certaines variables diffèrent.
Catarina est une fillette encore en apprentissage de la vie et ayant la chance de recevoir les enseignements d'
Arte, qui elle, semble désormais relativement émancipée, ou tout du moins en bonne voie pour surmonter les épreuves qui se dresseront devant elle. À mon sens, ce qui est intéressant dans la relation
Arte/
Catarina, c'est d'abord le fait de voir comment
Arte va procéder pour déconstruire la jeune fille et ses parents, tout en faisant en sorte que
Catarina soit acceptée dans la société malgré sa passion pour la cuisine. Ensuite, c'est de constater l'impact que ceci peut avoir sur une personne qui a encore tout à vivre, et qui a dans son entourage proche des personnalités telles que
YuriYuri ou
Arte elle-même.
Si le personnage de
Catarina semble être d'une intelligence impressionnante pour son âge, cela n'explique pas pour autant la maturité de sa décision de rébellion contre ses parents, qu'on attribuerait davantage à une adolescente. Paradoxalement, l'intrigue dont elle fait preuve parait être essentielle au récit, afin de mettre en place un parallèle avec le vécu d'
Arte, bien que
Catarina ait un caractère plus teigneux. Le fait qu'elle soit une petite fille est tout de même bien vite rappelé au spectateur, notamment lorsque son inquiétude porte sur le fait de se faire réprimander pour exercer une "activité de domestique", sans avoir conscience que ses parents ne la voient que comme une future femme à marier, et donc un manque à gagner pour son père.
Catarina est le centre de cet épisode, on en apprend bien plus sur l'origine de son comportement et ce qui lui pèse sur l'esprit. L'un des thèmes abordés ici est l'acceptation pour mieux avancer.
Yuri dit lui-même de manière assez froide qu'"accepter cet état de fait ne peut que la rendre heureuse", en parlant de
Catarina et de son implication dans sa famille biologique. On peut y voir un versant sombre de la personnalité de
Yuri, qui souhaite manipuler sa nièce, ou alors y voir le fait que
Yuri a bien conscience de la situation de sa nièce et qu'il sait qu'accepter cet état de fait, qu'elle ne maîtrise pas, lui permettra de mieux appréhender ses objectifs de vie. Car si on peut tirer une morale, ce serait que lorsqu'on rencontre un obstacle dans la vie, et qu'on y ajoute le fait qu'il y a des éléments qu'on ne maîtrise pas, cela ne sert à rien de combattre, autant accepter cet état de fait et passer à autre chose ou emprunter un autre chemin. In fine, c'est ce que comprend la fillette, parce qu'en plus d'être
Catarina, c'est aussi une fillette, elle décide de montrer son apprentissage à son père et de consacrer son énergie à autre chose au lieu de se battre inutilement contre ses parents. On le voit et on le sent, elle est plus heureuse ainsi.
Dès sa naissance, la nièce de
Yuri a été envoyée dans une résidence secondaire pour y être élevée par une nourrice. Cela peut paraître choquant à nos contemporains, mais à l'époque du Moyen-Age et de la Renaissance, c'était une pratique largement répandue dans la noblesse. Dans le cas spécifique de
Catarina, on apprend qu'avant de quitter sa nourrice, elle n'a jamais rencontrer ses parents et c'est là l'élément perturbateur de l'épisode. Comment un enfant qui a grandi sans voir ses parents peut-il leur porter de l'affection alors que ceux-ci maintiennent une distance ?
Catarina considère sa nourrice comme sa mère et ses parents comme des inconnus. L'épisode se conclut sur une des scènes les plus belles que l'on peut voir, la force de cette scène est sans conteste. Une mère aimante mais distante, mais dont l'amour maternelle prend le dessus, pour finalement voir
Catarina comme ce qu'elle est, une fillette en manque d'affection parentale. Ces mots sont forts et je remercie la production d'avoir transmis tant de force dans cette scène : "Moi, j'aimerais être serrée très fort".
La mère de
Catarina, par une scène courte mais loin d'être anodine, nous montre l'état de la femme à cette époque. Elle tremble du fait de s'être opposée à son mari. C'est dire la force et la place qu'occupe le pater familia dans la famille. On voit là une belle forme d'émancipation surtout quand on sait que c'est au profit d'un enfant mal aimé.
Pour moi, cet épisode montre toute la force et la qualité de l'anime, qu'elle soit graphique ou scénaristique. Cette scène de réconciliation entre
Catarina et sa mère est tout simplement magnifique : dans son geste, par la réconciliation elle-même, et sa production, par le détail mis sur les personnage et la transmission de ce qu'ils ressentent. J'ajouterai que la main d'
Arte a un nombre incalculable de significations au cours de l'anime, plusieurs moments forts sont marqués par
Arte qui tend la main, tantôt au profit de
Catarina, tantôt pour signifier son refus d'aide parce qu'elle va s'en sortir par elle-même.
Comme à l'accoutumée,
Arte nous propose un épisode fort riche. La saison touche quasiment à sa fin, tout comme le contrat initial entre
Arte et
Yuri.
Arte a les cheveux qui ont poussé... Serait-ce un regain de féminité ? Plus elle s'affirme en tant que la femme qu'elle est, plus ses attributs féminins reviennent, alors qu'elle avait coupé ses cheveux en début d'anime pour tenter de se mettre sur un pied d'égalité avec les hommes. Ce changement tient aussi lieu de marqueur temporel, quand on n'en a que très peu d'autres et rappel que la mission d'
Arte semble s'approcher de la fin.
Arte repartira-t-elle bientôt pour Florence ou restera t-elle auprès de
Catarina ? Je pense que la réponse sera bien plus complexe. En effet, dans cet épisode,
Leo accepte un travail compliqué alors qu'il est seul quand, de son côté,
Arte prend conscience des débouchés qui lui sont proposés.
Arte a été embauchée pour deux raisons : l'éducation de
Catarina et peindre les portraits de la famille Fariel. Maintenant que l'éducation de
Catarina est en bonne voie, elle peut se consacrer à sa deuxième mission.
Catarina, épurée des tracas qui la rongeaient et la rendaient exécrable, redevient la petite fille qu'elle devrait être. La scène d'introduction en est un exemple, autant que le fait que
Catarina s'est attachée à
Arte et veuille son attention.
Un nouveau point est abordé dans l'épisode :
Arte n'est plus seulement une femme qui affirme ses compétences dans un milieu masculin et sa noblesse la rattrape. Bien qu'elle soit accueillie avec respect et dignité dans l'atelier des Fariel, l'écart entre noble et roturier semble se creuser. Sa noblesse peut être prise pour une marque négative qui lui offre des facilités et de l'orgueil - le spectateur omniscient le sait, ce n'est pas vrai. On repense alors aux paroles de
Leo qui lui souhaite de pouvoir atteindre des horizons qui lui ont échappé du fait de sa conditions roturière. L'apprenti avec lequel
Arte parle est une allégorie de tous les peintres non nobles et moins bien éduqués qui se voient fermer des opportunités du fait de leur origine sociale. Les mains de l'apprenti marquées par le travail et l'effort sont un rappel évident qu'
Arte a négligé son art au profit de l'éducation de
Catarina. Si les cheveux sont un attribut de féminité, ses mains en parfait état son celui de la noblesse : elle ne montre plus des mains de peintre et d'apprentie mais celles de noble.
Yuri, qui passe outre l'état de santé d'
Arte et semble être froid et sans cœur, ses paroles sont une injonction à régler et identifier la cause de son trouble.
Yuri rappelle qu'il n'est pas son maître chargé de son apprentissage, mais son employeur qui l'a engagée pour ses compétences, qui ont été négligées. La fin de l'épisode vient atténuer les remarques de
Yuri puisqu'il manifeste sa satisfaction d'avoir engagé
Arte.
Cet épisode est clairement un pont vers la fin de la saison : des intrigues s'ouvrent et se referment pour proposer une apothéose au prochain épisode. Quel est l'avenir d'
Arte ? Plus que ça, que vont devenir
Leo,
Catarina,
Yuri et vers quoi tend le projet avec
Ubertino ?
Cette saison se finit en apothéose. N'en déplaise à ceux qui n'aiment pas les tranches de vie,
Arte est une réussite, un anime maîtrisé de bout en bout. Je pourrais mille fois vanter cette série, mais on peut la résumer simplement à une œuvre qui maîtrise son sujet.
Arte parle bien évidemment d'art, mais aussi d'histoire et de féminisme. C'est si beau, je n'irai pas jusqu'à dire que les dessins sont faits par Michel-Ange lui-même, toutefois on sent qu'il y a une volonté de s'appliquer, la scène finale en est un bon exemple. Ce plafond est magnifique. Quant à l'Histoire, bien que l'époque soit celle de la Renaissance en Italie, elle n'est pas explicitement abordée afin de plutôt mettre en avant la lutte des classes sociales et de genres. Par contre, on voit une volonté de bien faire, ainsi la série est saupoudrée d'éléments historiques qui permettent d'ancrer le récit et le lecteur dans le XV/XVIème siècle à Florence et à Venise.
Pour conclure à la fois l'arc et la saison,
Arte nous propose un épisode centré autour de la nostalgie. C'est le seul épisode qui propose des flashbacks sur des évènements survenus pendant la saison. C'est aussi la conclusion de la lutte entre l'inné et l'acquis.
Arte n'est plus seulement vue par l'origine de sa naissance et son genre, mais bien pour la personne qu'elle est, bien au-delà de l'art et de la peinture. Le passage où tout le monde se joint à elle pour finir la fresque le montre : ils ne l'aident pas parce que c'est une fille noble qui a trouvé sa place, ils sont présents pour soutenir une amie. Une autre manifestation de la réconciliation entre l'inné et l'acquis réside dans la scène de discussion avec l'apprenti de l'atelier des Fariel. En effet, l'apprenti, qui symbolise à ce moment tous les apprentis artisans, ne semble pas avoir de nom justement pour renforcer ce côté impersonnel. Cet individu se confie alors et parle au nom de tous, en faisant en sorte qu'
Arte soit vue à sa juste valeur, qu'elle a acquise bien qu'elle soit née en tant que femme noble.
In fine, je ne pense pas que ce soit une oeuvre politique, mais plutôt ayant pour but de sensibiliser au féminisme.
Arte raconte avant tout une histoire, c'est un divertissement et un bon. On retrouve un personnage confronté à des difficultés qu'il devra surmonter et il finit par accomplir son objectif en ayant grandi et appris. Je ne perçois pas cette historie comme purement féministe, on y retrouve un certain nombre de leçons de vie qui vont bien au-delà de la lutte des genres. De plus, si ça avait été le cas, l'autrice aurait scénarisé le récit à une époque plus contemporaine, identifiable pour le lecteur/spectateur. De mon point de vue, c'est l'occasion d'observer des événements historiques, car la femme au Moyen-Age est un élément historique avant tout.
Je recommande vivement cet anime. Ce n'est pas une histoire d'action médiévale fantastique, cependant l'intensité dans le scénario est bien présente. C'est une belle tranche de vie, instructive de surcroît. Je n'espère pas spécialement de suite, pour moi, ces 12 épisodes ont un début et un fin. Mon seul regret : qu'on n'ait pas vu assez de la structure politique des cités-États... Après tout, nous ne sommes pas dans la série Borgia !